Recettes miracles et marchands d'illusions

Gilbert Lavoie
Le Soleil

(Québec) Les campagnes électorales ont ceci de particulier que, du jour au lendemain, la plupart des grands problèmes qui nous affligent font l'objet d'une solution immédiate. Ainsi, quand les travailleurs de la forêt sont mis à pied, Jean Charest leur trouve des emplois dans le secteur des mines. Vu de Montréal, de Gatineau ou de Québec, ça peut paraître alléchant. Après tout, les mines et la forêt, c'est au même endroit, dans le Nord et les régions ressources. Tu perds ton emploi dans le bois le matin, tu frappes à la porte de la mine en après-midi et c'est réglé?

Je sais que c'est un peu simpliste ou caricatural comme illustration, mais la réalité est tellement plus complexe. Les mines et la forêt, c'est souvent à des milliers de kilomètres de distance. Et le métier de mineur, c'est totalement différent de celui de travailleur forestier.

«A beau mentir qui vient de loin», nous apprend le dicton. Je ne les accuserai pas de mentir, mais je constate que les promesses des trois partis impliqués dans cette campagne électorale ne disent pas toute la vérité et sont souvent irréalistes. Quand Pauline Marois promet de rapatrier à Québec la compétence du gouvernement fédéral en matière de culture, comme le demande aussi Jean Charest, on voit mal quelle pression de plus elle pourra mettre sur Stephen Harper pour y parvenir. Une menace de faire cette souveraineté dont elle ne parle pas en campagne électorale, quand elle n'a même pas de mandat pour tenir un référendum?

Mario Dumont tombe dans la même facilité. Il promet de réduire le nombre de prestataires d'aide sociale en leur faisant signer un contrat énonçant qu'il s'agit d'une aide temporaire et édictant la marche à suivre pour réintégrer le marché du travail. En prime, une prestation de 3000 $ aux entreprises, à l'embauche d'un prestataire.

La formule de subventions aux entreprises existe déjà pour les personnes handicapées et les immigrants, et elle a été essayée pour l'ensemble des bénéfiaires. Le problème, c'est que certaines compagnies touchaient la subvention et mettaient le prestataire à la porte à la fin de l'année pour embaucher le suivant et toucher une autre subvention. Les gouvernements ont essayé mille et un trucs pour réintégrer ces gens sur le marché du travail. On a constaté que les méthodes coercitives n'étaient pas plus efficaces que les méthodes incitatives. Veut-on revenir aux «Boubou macoutes», ces inspecteurs mandatés pour dépister les fraudeurs de l'aide sociale sous Robert Bourassa?

Il y aura toujours des gens aptes au travail à l'aide sociale, et il faudra toujours des programmes pour les ramener sur le marché du travail. S'il est un domaine qui a fait l'objet d'expériences et de recherches au fil des ans, c'est bien celui-là.

La proposition de M. Dumont est basée sur le fait qu'il est incompréhensible que 136 000 Québécois aptes au travail touchent de l'aide sociale. Sur papier, c'est en effet difficile à comprendre. Mais quand on regarde la réalité de ces gens, leur taux de scolarité, leur situation familiale ou leur âge, on constate qu'il n'existe pas de solution magique à ce problème. Ce n'est pas dire qu'il faille abandonner, mais ce n'est pas en campagne électorale qu'on va trouver le secret.

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